VIANDE ROUGE: LA FIN D'UN MYTHE?

STÉPHANIE DE ROGUIN

Publié il y a 3 semaines

02.01.2025

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Traditionnellement promue comme une source importante de fer et de protéines, la viande rouge tend à perdre ses lettres de noblesse.

Dans la dernière version de la pyramide alimentaire, diffusée en septembre 2024, la viande rouge a été supprimée. Cette nouvelle représentation graphique substitue au steak un blanc de poulet. En parallèle, les légumineuses sont valorisées comme sources de protéines. L’aliment ne disparaît cependant pas des recommandations. Il est toujours conseillé de consommer une portion de 100 à 120 grammes de viande (toutes sortes confondues) deux à trois fois par semaine. Ces recommandations sont établies par la Société suisse de nutrition (SSN) et l’Office fédéral de la santé et des affaires vétérinaires. 

«La pyramide alimentaire représente ce qui est le plus conseillé de manger», précise Pedro Marques Vidal, spécialiste en recherche clinique au Service de médecine interne du CHUV, qui a participé à ces travaux. La SSN et l’OSAV ont d’ailleurs aussi pour la première fois pris en compte l’impact environnemental des aliments, ce qui explique que la viande rouge est peu valorisée dans ce contexte.

Mais surtout, plusieurs études ont montré que la viande rouge, et plus encore la viande transformée, comme les saucisses ou la charcuterie, peut provoquer, quand elle est consommée en excès, une augmentation du risque de maladies cardiovasculaires et de diabète de type 2. Le cancer colorectal peut aussi être directement lié à la consommation de viandes transformées. Les raisons sont encore peu connues, mais il pourrait s’agir d’un apport excessif en graisses saturées et en fer ou de la formation d’éléments pro-oncogènes dans le microbiote intestinal lors de la digestion de la viande. «Le problème tient également au fait qu’avoir une grande portion de viande dans son assiette induit des portions plus menues de légumes et de céréales complètes, donc de fibres et de vitamines, notamment», souligne Esther Guex, diététicienne clinicienne au CHUV.

Source de fer et de protéines

Malgré tout, la viande rouge reste une source importante de protéines et de fer – un élément indispensable à notre santé. «Le fer de la viande est nettement plus biodisponible que celui qu’on trouve dans les végétaux», explique  Pedro Marques Vidal. La viande – ainsi que le poisson et les œufs - contient aussi de la vitamine B12, qui ne se trouve pas ailleurs. Renoncer à la viande nécessite donc de compenser avec trois fois plus de fer d’origine végétale et de se supplémenter avec de la vitamine B12, ce qui est le lot des personnes ayant adopté un régime végane.

Si la viande rouge est souvent recommandée pour les individus souffrant d’anémie, «rien ne prouve que d’en ingérer de grandes quantités va effectivement réduire la carence en fer», avertit Esther Guex. Tout dépend aussi de ce qui accompagnera notre viande: les produits laitiers, le thé ou le café ont tendance à annihiler l’absorption du fer par l’organisme, alors que la vitamine C améliore son absorption.

De l’art de faire et de cuire

Savoir exactement ce qui dans la viande provoque les risques mentionnés ci-dessus est donc encore peu connu. Mais de l’avis des deux spécialistes, tout lien entre alimentation et santé relève d’une alchimie extrêmement complexe. La manière de produire la viande, de la transformer, et surtout de la cuire peut influencer son assimilation par le corps: on suppose par exemple que le fait de beaucoup griller la viande, au barbecue ou même à la poêle, peut générer des substances cancérigènes. «Concernant la viande transformée, plusieurs techniques sont utilisées comme la salaison, la fermentation, la maturation et la fumaison, précise Esther Guex. Ces méthodes peuvent impliquer l’ajout de conservateurs et autres additifs, qui à la longue peuvent présenter des risques pour la santé, notamment des effets cancérigènes.»

Source: Recommandations nutritionnelles suisses pour les adultes, Société Suisse de Nutrition, Département fédéral de l’intérieur DFI, Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV).
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