Les écrans emportent des vies sur la route
Publié il y a 1 mois
18.12.2024
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En Suisse, les urgences des hôpitaux continuent de recevoir des victimes de la route, avec 3891 blessé-es graves sur les 53 470 accidents recensés par l’Office fédéral des routes en 2023 (un chiffre relativement stable depuis une dizaine d’années). Ce nombre oscille entre 50 000 et 55 000 chaque année depuis 2011. Si les décès sont en légère baisse, ils représentaient tout de même 228 vies perdues. Derrière ces statistiques se cache une réalité préoccupante: depuis le début de la décennie, les accidents mortels dus à l’inattention et aux distractions dépassent ceux liés à l’alcool. Symbole de cette tendance, l’année 2022 a vu 36 personnes perdre la vie pour cette raison, contre 25 à cause de l’alcool.
Faut-il ajouter ces décès à la liste des effets toxiques des écrans, qui perturbent déjà le sommeil, les relations sociales, et parfois le parcours scolaire? Avant de répondre, examinons de plus près ce qui se cache derrière la catégorie «inattention et distractions» de l’Office fédéral des routes.
Cette catégorie englobe divers comportements ou situations qui éloignent, parfois brièvement, l’attention du conducteur de la route. Parmi eux, l’inexpérience de conduite, la méconnaissance de la route empruntée, ou encore l’attention portée à un passager, un animal, un téléphone ou un appareil embarqué comme la radio ou le GPS. En 2022, sur les 36 décès attribués à cette catégorie, la majorité était due à des «manques d’attention momentanés» et seuls trois d’entre eux étaient directement liés à l’usage du téléphone portable. Un chiffre qui oscille entre zéro et trois depuis plus de dix ans. Les écrans ne sont donc pas, à eux seuls, la principale cause de distraction fatale. Mais les accidents dus aux distractions peuvent être ajoutés à la liste des risques liés aux écrans, comme l’addiction, le trouble du sommeil et le décrochage scolaire.
Repenser nos réflexes pour sauver des vies
Comment réduire ces moments d’inattention passagers, qui sont souvent la cause de ces tragédies? Une solution serait d’améliorer la qualité du sommeil, car un cerveau bien reposé est plus apte à maintenir un état d’alerte propice à la conduite. Cela implique de limiter les écrans avant le coucher, une habitude dont les effets bénéfiques sur le sommeil sont désormais bien connus.
Une autre piste intéressante nous vient de la recherche en neurosciences. Une étude suisse de 2024, menée par le professeur Valerio Zerbi de l’Université de Genève et publiée dans Nature Neuroscience, révèle que notre cerveau active des circuits neuronaux spécifiques pour passer d’une concentration focale à un état d’alerte général. Ces deux états peuvent être renforcés par l’entraînement, comme le font les athlètes de haut niveau. Au volant, maintenir un niveau d’alerte globale pourrait donc sauver des vies. Quant aux capacités de concentration focale, mieux vaut les réserver à des moments plus appropriés, comme celui du suivi des posts, réel et autres messageries, confortablement installé sur un canapé ou le siège d’un train.